Mains Haghighi

Mains Haghighi
Photo: Amanda Edwards (Getty Images)

Le cinéaste iranien Mani Haghighi, dont le nouveau film Soustraction devait être présenté en première au Festival du film de Londres ce week-end, a été interdit de quitter l’Iran. Bien qu’il ait assisté au Festival international du film de Toronto en septembre, Haghighi aurait été empêché par les autorités iraniennes d’embarquer sur un vol à destination de Londres.

Dans une déclaration obtenue par Date limite, un porte-parole du London Film Festival a confirmé que Haghighi avait été «refoulé» alors qu’il tentait d’embarquer et que son passeport avait été confisqué. « Il est rentré chez lui à Téhéran », indique le communiqué. « Nous comprenons qu’aucune raison n’a été donnée à Mani Haghighi pour la confiscation. Le BFI London Film Festival soutient Haghighi et tous les cinéastes dans leur liberté de réaliser leurs films et de les présenter dans le monde entier.

La mesure prise contre Haghighi marque la dernière étape de la répression à l’échelle nationale contre les cinéastes au milieu de manifestations massives. En juillet, le célèbre réalisateur Jafar Panahi a été condamné à six ans de prison, suscitant un tollé et une marche de protestation à la Mostra de Venise en septembre. Les médias iraniens ont rapporté que Panahi avait été arrêté après s’être renseigné sur l’arrestation de deux collègues, les cinéastes Mohammad Rasoulof et Mostafa Al-e Ahmad. Avant leur arrestation, Rasoulof et Ale-Ahmad avaient partagé des déclarations sur les réseaux sociaux critiquant la réponse du gouvernement iranien aux manifestants à Abadan.

Des mois plus tard, les manifestations en Iran n’ont fait que gagner en virulence à la suite de la mort, le 16 septembre, de Mahsa Amini, 22 ans, alors qu’elle était en garde à vue. Trois jours avant sa mort, Amini avait été arrêtée pour avoir porté son hijab trop lâche. Bien que les autorités iraniennes affirment qu’Amini est morte d’une crise cardiaque, des témoins oculaires et ceux qui ont été détenus à ses côtés affirment que Amini a été roué de coups par des policiers.

Haghighi parle librement à la fois de sa propre arrestation et des manifestations en cours dans une déclaration filmée qui sera montrée avant Soustraction‘s samedi première à Londres. Dans la vidéo, obtenue par VariétéHaghighi présente ses excuses pour son absence et déplore le « comportement tout à fait grossier des autorités iraniennes.” Bien que Haghighi affirme qu’il n’a reçu « aucune explication raisonnable » pour sa détention, il élucide ses deux propres théories sur les raisons pour lesquelles le « régime iranien » voudrait le garder dans son pays.

Haghighi partage : « La première est celle-ci : il y a quelques semaines, j’ai enregistré une vidéo Instagram dans laquelle je critiquais Les lois iraniennes obligatoires sur le hijab et la répression contre les jeunes qui protestent et tant d’autres incidents d’injustice dans leur vie. Peut-être que les autorités pensaient qu’en me gardant ici, elles pourraient mieux me surveiller, peut-être me menacer et me faire taire. Eh bien, le fait même que je vous parle dans cette vidéo en ce moment sape en quelque sorte ce plan.

Il poursuit : « La deuxième théorie est qu’il s’agit d’un exil à l’envers. Qu’ils fassent de mon propre pays et de ma propre maison une prison insupportable pour moi et qu’ils me punissent en me forçant à y rester comme prisonnier. Eh bien, laissez-moi vous dire qu’être ici à Téhéran en ce moment est l’une des plus grandes joies de ma vie. Je ne peux pas mettre de mots sur la joie et l’honneur de pouvoir être témoin de première main de ce grand moment de l’histoire. Et je préférerais être ici que n’importe où ailleurs dans le monde en ce moment. Donc, si c’est une punition pour ce que j’ai fait, alors n’hésitez pas. J’espère que vous apprécierez le film. Je promets d’être avec vous avec mon prochain film très bientôt. Et permettez-moi de terminer avec les trois mots qui nous ont donné Iraniens tant de joie et de courage ces dernières semaines : femme, vie, liberté.